Mes débuts « acrobatiques » à RFI
par Jean-Pierre Boris
Jean-Pierre Boris a effectué presque toute sa carrière à RFI. De 1977 à 2021, il a connu la plupart des évolutions de l’entreprise et participé à son développement. Dans ce texte, il revient sur ses débuts.
J’avais depuis longtemps décidé de devenir journaliste mais, lassé des études supérieures, je ne voulais pas faire d’école. Pour pénétrer la profession, je décidais de me forger une spécialité, l’Amérique latine. Quoi de mieux donc que d’y aller, s’y établir et vendre des papiers ? Encore fallait-il avoir quelques contacts dans les rédactions. A 22 ans, je n’en avais pas.
Ma grand-mère maternelle m’informa que l’une des maîtresses de son défunt époux – il en avait eu beaucoup – connaissait quelqu’un dans la presse. Cette dame était pharmacienne près de la station de métro Dupleix. Elle me recommanda à Raymond Paccard qui était rédacteur en chef à RFI. Par un beau jour de 1977, je débarquai donc au 5ème étage de la Maison de la Radio, par la porte F.

Raymond Paccard était aussi petit que j’étais grand, aussi chauve que j’étais chevelu. Mais mon projet lui plut et il me proposa de faire des piges. Allez savoir pourquoi et quel intérêt cela représentait pour les auditeurs, je lui proposai de réaliser l’interview de Blanca Asturias, la veuve (encore une) du grand écrivain guatémaltèque Miguel Angel Asturias. Celle-ci vivait à Paris et par des contacts dans la communauté latino-américaine, j’obtins ses coordonnées et un rendez-vous.
Pluie, ciseaux et cols Claudine !
Elle habitait dans une rue perpendiculaire à l’avenue de la Grande-Armée et il pleuvait dru le matin où je sonnais à son interphone. Je m’en souviens bien de cette pluie parce que je suis resté dessous toute la journée avec à l’épaule un Nagra qui pesait à l’époque douze kilos. Blanca Asturias n’arriva en effet qu’en fin d’après-midi.
Le lendemain matin, de retour à la rédaction, restait le plus dur : le montage de l’entretien… une grande première pour moi. On me confia donc une paire de ciseaux et on m’attribua une cabine de montage. Muni de quelques explications sur comment faire, à quoi servait ces rubans bleus et jaunes qui traînaient là, ces petites étiquettes « col claudine », on m’abandonna à mon sort. J’avais pour mission d’extraire une ou deux minutes de cette interview, je ne me souviens plus précisément.
Aux yeux des rédacteurs en chef de RFI qui étaient regroupés dans la même pièce que Raymond Paccard, c’était probablement une affaire de quelques minutes. Mais, à leur grand étonnement, je ne réapparus que huit heures plus tard. C’est le temps qu’il me fallut pour comprendre qu’un son pouvait correspondre à un petit morceau de bande magnétique et que ce morceau de bande magnétique était obligatoirement celui situé devant la tête de lecture. J’avais les mains couvertes de collants, le sol était jonché de minuscules morceaux de bandes magnétiques et le montage devait être un peu haché.
De la radio mais aussi de l’écrit
Fort de cette première expérience qui me fut royalement payée, on me demanda de passer à l’écrit. RFI expédiait alors des fiches écrites aux journaux africains qui en nourrissaient leurs colonnes. Cela partait par le courrier et arrivait un peu plus tard. Ce n’était donc pas du « hot news ».
Paccard m’avait laissé un mot pour me demander un papier sur, me sembla-t-il « les Cortes » le parlement espagnol. Je lui livrai dans la foulée mais j’avais mal lu. Les Cortes ne l’intéressaient pas du tout. Ce qu’il voulait, c’était un papier sur les COPTES égyptiens ! Je n’avais pas trop compris le prisme africain de RFI et d’ailleurs, à l’époque, je ne m’y intéressais guère.

Aussi proposais-je un nouveau papier sur la littérature latino-américaine. Je ne sais plus ce que j’avais raconté mais une fois le papier rédigé, l’idée me prit d’appeler le grand écrivain argentin Julio Cortazar, non pas pour l’interviewer ce qui aujourd’hui me semblerait normal, mais pour lui soumettre les grandes lignes de ce que j’avais écrit. Je vous passe les détails de la conversation mais il m’expliqua en synthèse que mon texte n’était qu’un « tissu de conneries ». Je corrigeai donc un peu la copie qui fut envoyée par courrier à la presse africaine.
D’abord l’Afrique
Puis je m’envolai vers l’Amérique latine, le Mexique d’abord, et quelques années plus tard, je fus recruté sur concours à RFI pour le lancement des émissions vers l’Amérique latine qui devaient débuter fin 1982. Je me présentai donc pour prendre mes fonctions le 1er septembre 1982.
Comme les émissions latino-américaines ne devaient démarrer qu’un peu plus tard, on m’affecta en attendant aux journaux africains. L’Afrique ? je ne savais pas où c’était. La présentation de journaux ? je n’en avais jamais faite. J’avais comme rédacteur en chef Guy Riboreau qui s’est déjà exprimé dans ces colonnes et comme partenaire de jeux Robert Minangoy dont vous lirez bientôt la copie.
Voilà donc comment je démarrai une carrière qui n’a pris fin qu’à l’été 2021… toujours à RFI.
L’auteur

Jean-Pierre Boris
Né en 1954 à à Boulogne-Billancourt
Journaliste à RFI de 1982 à 2021 dont
Chef de service adjoint au service étranger
SDR tout info
Chroniqueur matières premières (1998-2005)
Chef du service France (2005-2006)
Afrique Eco (2007-2014)
Eco d’ici Eco d’ailleurs (2014-2021)








































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